Partager la publication "Lutter contre le réchauffement climatique avec votre coup de fourchette"
On ne fait pas souvent le rapprochement, mais notre coup de fourchette a une grande incidence sur l’environnement et le réchauffement climatique. Notre manière de consommer les aliments a un impact carbone et écologique très important.
A l’heure où j’écris cet article, les mises en garde concernant le futur de l‘environnement et de l’Homme sont inquiétants. Suite au fameux cri d’alarme des 15 000 scientifiques de 2017 (1), le dernier rapport du Giec (2) est sans appel: il y a urgence pour l’avenir et le réchauffement climatique, avec ses nombreuses conséquences négatives, n’est plus un leurre. À cela, on ajoute que 60% des espèces vertébrés ont disparu depuis près de 40 ans (3). On parle de la 6ème extinction de masse (4) et nous en faisons partie…
La transition écologique n’est plus négociable et il va falloir inéluctablement changer nos habitudes et notre manière de consommer. Tout le monde peut et doit agir à différents niveaux. Le mode de consommation, en l’occurence alimentaire, en fait partie et je vais vous dévoiler les meilleures conseils pour que votre coup de fourchette soit le plus écologique possible.
7 conseils pour mieux consommer afin de préserver l’environnement et lutter contre le réchauffement climatique.
L’importance de l’alimentation
Si nous vivons dans un pays développé, nous disposons de toute la nourriture nécessaire et ce, sans contrainte. Les marchandises circulent à flux tendu dans les commerces et supermarchés. Il nous suffit juste de nous rendre dans ces « temples de la consommation » pour acheter de quoi nous nourrir.
C’est pourquoi nos choix de consommation ont une importance capitale dans la lutte contre le réchauffement climatique. Désormais, il convient de faire des achats raisonnés et des concessions. Nous ne pouvons plus être égoïste et penser à nous-même pour satisfaire notre propre petit plaisir. Il faut faire des efforts. Voici comment.
1.Manger moins de viande
L’élevage d’animaux, dont notamment de boeufs, est extrêmement polluant. Certains personnes mangent de la viande tous les jours et cela doit changer.
Tout d’abord, il faut savoir que l’élevage d’animaux pollue plus que les transports ! En effet, l’élevage est responsable de 14.5% des émissions de gaz à effet de serre mondiales ce qui est légèrement plus que le secteur des transports… Le bétail est responsable de 50% des émissions de méthane et de protoxyde d’azote. Ces deux gaz ont respectivement un potentiel de réchauffement 300 fois et 25 fois supérieur à celui du CO2 ! Cela provoque donc d’importants rejets de gaz à effet de serre.(5)
Ensuite, l’levage de bétail nécessite une forte consommation d’eau. Pour produire 1 kg de boeuf, il faut l’équivalent d’une petite piscine soit 15 500 litres d’eau. En comparaison, le blé c’est 1300 litres d’eau et les carottes 131 litres. Parlons aussi des hectares de déforestations massives qui sont nécessaires pour produire à manger aux animaux (soja, maïs etc) au lieu que ces champs servent à nourrir les Hommes.
Enfin, il faut prendre en compte les autres types de pollutions: les nitrates et phosphates provenant des épandages de fumier ainsi que les rejets de pesticides et d’engrais polluent fortement les eaux.
L’idée est donc de manger une fois de temps en temps un morceau de vraie et bonne viande (fermière nourrie à l’herbe des pâturages) plutôt que de la mauvaise à prix bas, cinq fois dans la semaine. La bonne viande a un coût mais il vaut mieux se faire plaisir occasionnellement avec un produit de qualité. Enfin, il est tout à fait possible d’arrêter d’en manger. Consultez d’ailleurs mon article sur les végétaliens ici afin de faire attention aux carences et de profiter pleinement d’un régime 100% végétal.
2.Acheter bio
Les pesticides nuisent à la biodiversité, c’est un fait ! Selon Claude Bourguignon, ingénieur agronome, on a de nos jours une perte de 90% de la biodiversité des sols ce qui est catastrophique. Les fruits et légumes sont énormément moins riches en nutriments qu’il y a 70 ans en arrière (par exemple, selon la FAO, il faut manger l’équivalent de 100 pommes aujourd’hui pour avoir l’équivalent en vitamine C d’1 seule pomme de 1950).
Le labour des sols de l’agriculture conventionnelle détruit également les sols et favorisent les inondations car l’eau ne peut plus s’écouler normalement (la terre est trop compacte).
Acheter bio, c’est donc boycotter l’utilisation de pesticides qui nuisent à la biodiversité. Rappelons que l’Homme ne peut vivre sans la nature. Nous avons besoin des vers de terre, des abeilles et de tout ce que regorge la nature pour nous permettre de bien vivre. Sans vers de terre, les sols ne respirent plus, sans les abeilles, on a une chute drastique des productions de fruits et légumes.
Attention cependant au marketing du bio dont les industriels se sont emparés… Si les prix sont trop bons marchés, c’est qu’ils viennent de pays plus ou moins lointains. Les normes ne sont pas du tout les mêmes et des pesticides interdits dans notre propre pays peuvent donc être présents dans ces aliments pas si bio que ça… D’où la recommandation n°3. Retrouvez aussi mes explications sur les différents label bio dans l’article ici.
3.Acheter local et de saison
L’internationalisation de la production alimentaire est une aberration totale. Afin de diminuer les coûts, certains aliments parcourent des centaines ou des milliers de km avant d’arriver dans nos assiettes. Cela a un impact carbone énorme et cela n’a pas de sens ! Sans parler des normes qui ne sont pas les mêmes… Nous pouvons donc nous retrouver avec des aliments qui contiennent des pesticides interdits en agriculture dans notre propre pays. Ironie du sort, ces aliments importés sont autorisés bien que les autorités soient au courant…
Il faudrait en fait consommer 85 à 90% local et de saison. Et garder 10-15% de produits que nous ne pouvons pas forcément trouver là ou l’on habite et qui sont importés (ex: huile d’olive, oléagineux etc.). Dans ces 10-15%, nous pouvons aussi avoir quelques exceptions dans l’année pour se faire plaisir (une mangue, un ananas etc).
Voici deux exemples d’aberration :
1. La saucisse Suisse: les boyaux de porc suisses sont transportés en Chine (main d’oeuvre moins chère). Tout y est calibré et traité sur place pour finalement revenir en Suisse afin que les saucisses soient fabriquées…On appelle cela des « boyaux voyageurs » avec un total de 44 315 km parcourus ! Le pire est que presque personne n’est au courant de cela… (6)
2. La crevette grise: pêchée dans la mer du Nord, elle va d’abord passer en Allemagne, puis, va voyager jusqu’au Maroc pour y être traitée pour enfin finalement revenir en Allemagne… Au total, la crevette grise parcourt 6756 km ! (7)
Acheter local et de saison permet donc de moins polluer. En effet, moins de transports (avion, camion etc.) sont nécessaires pour approvisionner les marchandises. Fini les tomates et les fraises en hiver qui viennent des quatre coins du monde. Il faut devenir raisonnable et respecter le rythme des saisons en mangeant ce que la nature nous offre. Acheter local, c’est participer à la vie économique de votre région/pays et c’est également moins polluer. Pour cela, il faut penser à acheter en circuits courts auprès de commerces coopératifs, des AMAP, au marché de votre quartier ou, si vous avez la possibilité, directement dans la ferme d’un producteur.
4. Faire ses courses en vrac
Cela permet une énorme réduction des déchets ! Pourquoi ? Parce que lorsque vous achetez en vrac, il n’y a pas d’emballage (boite en carton, film plastique, barquette en plastique etc.) et vous achetez vos aliments tels quels. Il faut simplement se munir de ses bocaux et bouteilles en verre ainsi que de ses sacs alimentaires réutilisables pour les remplir. Acheter en vrac permet aussi de faire des économies car cela coûte moins cher que de petites quantités déjà préemballées en supermarché. Misez donc sur les quantités.
5. Ne pas acheter de produits comportant de l’huile de palme
Je ne sais pas si vous en avez vraiment conscience, mais la déforestation due aux cultures des palmiers pour récolter l’huile de palme est une catastrophe écologique planétaire. Des zones entières de forêts primaires sont détruites en Malaisie et en Indonésie pour y faire pousser des palmiers destinés aux industries agroalimentaires. Gaz à effet de serre (+ 15 à 20% à cause des déforestations), pollution, détérioration et appauvrissement des sols, destructions des habitats des animaux vivants sur place (les symboliques orangs-outans) sont autant d’exemples manifestes du problème.
Depuis 2007, ce sont plus de 40.000 hectares de forêt qui disparaissent chaque année au profit des palmiers à huile. Et dans les zones « durables », près de 40 % des terres ont été déboisées contre… moins de 35 % dans les zones « non durables » ! « Pour produire de l’huile de palme, il faut supprimer de la forêt. C’est incontournable », conclut Roberto Cazzolla Gatti. Pour preuve, l’Indonésie a déjà perdu 72% de ses forêts ! (8)
L’huile de palme est retrouvée dans de nombreux aliments comme des biscuits, des chips, la fameuse pâte à tartiner chocolatée préférée des enfants, des plats industriels salés etc. Mais aussi des cosmétiques, détergents et biocarburants. Si vous lisez les appellations comme huile de palme, acide palmitique, acide myristique, acide laurique ou acide stéraique, n’achetez en aucun cas le produit.
6. Boycotter certaines marques
Je vous suggère de vous rendre sur le site www.i-boycott.org afin de voir leurs campagnes et explications concernant certaines marques. Par exemple, le soda à la marque rouge le plus connu et vendu au monde est un produit à absolument boycotter.
En effet, pour produire 1 litre de soda, la compagnie utilise 2 litres d’eau. Elle pompe les nappes phréatiques notamment aux Mexique et en Inde. C’est un réel désastre écologique et ce sont toujours les mêmes, les pauvres agriculteurs et la population, qui en souffrent. Par exemple, un documentaire poignant montre comment des milliers de familles indiennes sont privées d’eau à cause de l’implantation de l’entreprise dans certaines régions. Si l’on rajoute les effets nocifs de cette boisson sur la santé, il convient urgemment d’arrêter d’en acheter, même occasionnellement.
Selon la FAO, 45 pays sont déjà en pénurie d’eau potable dont 29 en pénurie extrême. 20% des ressources souterraines sont surexploitées et risquent de s’épuiser rapidement. (9)
6. Optez pour des matériaux et ustensiles de cuisine durables et non toxiques.
- Changez vos sacs plastiques pour des sacs réutilisables en coton, toile, jute ou en papier pour aller faire les courses et mettre vos aliments.
- Privilégiez les courses en vrac en bocaux ou sacs alimentaires réutilisables.
- Ne plus acheter de matériaux en silicone, téflon et aluminium. Ces matériaux sont toxiques à la chaleur. Evitez aussi les films plastiques.
- Achetez des torchons, des spatules et planches en bois (d’olivier, bambou, hêtre), des plats en verre ou en céramique, des cocottes en fonte. Ce sont des matériaux durables et certains peuvent durer toute une vie.
7. Autres
- Composter les matières organiques permet de limiter les déchets et de pouvoir recycler intelligemment. Le compost peut être réutilisé en engrais.
- Ne jetez pas le marc de café mais utilisez-le dans du terreau pour l’enrichir. Il existe aussi des tutoriels pour faire pousser vos propres champignons grâce au marc de café.
Réflexions et projections dans le futur: effondrement ou transition ?
Il est aussi intéressant de sortir du cadre strictement alimentaire pour avoir une vision globale des enjeux pour l’avenir. J’ai lu pas mal d’articles, quelques livres et visionné quelques vidéos de spécialistes. Les pronostics sont loin d’être au beau fixe et faire l’autruche n’est pas une solution… Quand aux personnes qui n’y croient pas… Chacun se fait son propre jugement.
Les avis diverges concernant le futur et c’est normal car il est impossible de prédire à 100% ce qu’il va se passer. En revanche, les spécialistes sont unanimes: nous devons nous attendre à de grands changements et devrons faire preuve d’adaptation pour faire face aux problèmes écologiques que nous allons rencontrés. Et ce pour très bientôt ! On parle souvent de 2030-2050 et c’est demain !
Une autre chose semble faire l’unanimité: il faudrait diviser notre niveau de consommation par 4 à 6 (dans les pays développés) pour espérer avoir des répercussions positives sur le climat. Mais comment réagir lorsque le père de George W.Bush affirmait que « le mode de vie des américains n’est pas négociable » (9). Tout tourne à l’envers et trop de dirigeants ne semblent pas vouloir faire des efforts…
La machine est déjà lancée et rien ne semble pouvoir arrêter les futurs incidents. En revanche, il semble possible de ralentir la progression pour que cela soit moins pire: maintenir une hausse de +1,5 à 2°C pour la planète au lieu de 3°C voire 4-5°C (qui serait apparement impossible pour pouvoir vivre).
Différents profils de personnalités: auquel appartenez-vous ?
Il existe différents profils de personnes face à ce problème: il y a celles qui n’y croient pas du tout, celle qui pensent que la science et la technologie pourront tout sauver, celles qui pensent que la fin de la civilisation humaine est inéluctable et celles qui pensent qu’une transition est possible mais non sans problèmes importants à gérer. Enfin il y a certaines personnes (souvent avec du pouvoir et de l’argent) qui veulent simplement jouir de leur vie en consommant, exploitant et polluant à outrance sans se soucier de leur impact sur l’environnement. Ils se fichent royalement de tout le reste…
Une chose est sûre: l’être humain, qui fonctionne avec ses 5 sens, n’est en général pas capable de vraiment se projeter et d’anticiper surtout en ce qui concerne les problèmes. Qui n’attend pas d’avoir mal aux dents pour aller chez le dentiste au lieu de faire son contrôle annuel ? Qui n’attend pas d’être malade pour aller se soigner au lieu d’avoir une hygiène de vie préventive (alimentation, sport, sommeil etc.) ? Beaucoup trop de personnes fonctionnent malheureusement comme cela… Et ce comportement est bien ancré avec ce qui semble nous attendre. Attendre que le pire arrive de manière concrète pour enfin réagir au lieu d’anticiper et de changer alors que nous savons que nous fonçons droit dans le mur: c’est le syndrome du Titanic.
Quelle notion choisir pour le futur: effondrement ou transition ?
“Les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s’adaptent le mieux aux changements.” Charles Darwin
Le mot effondrement est souvent cité et il fait peur. En fait, on peut lui accorder une connotation moins catastrophique qu’au sens premier du terme. En effet, Pablo Servigne utilise la définition suivante sans son livre (10): c’est « le processus à l’issue duquel les besoins de base (eau, alimentation, logement, habillement, énergie, etc.) ne sont plus fournis [à un coût raisonnable] à une majorité de la population par des services encadrés par la loi».
Selon les prédictions les plus optimistes, nous ne serons donc pas confrontés à la fin de la civilisation humaine dans sa totalité. Mais plutôt à des phénomènes importants à la fois prévisibles et imprévisibles (tarissement des énergies naturelles provoquant un coût trop élevé pour pouvoir être utilisées comme avant (ex: pétrole), migrations climatiques, sécheresse, manque d’eau, catastrophes naturelles importantes, pillages, émeutes etc.) qui changeront drastiquement notre confort de vie et notre sécurité.
A côté de cela, on espère que des petits communautés résiliantes, un système d’entraide et de solidarité à tout épreuve ainsi que l’utilisation de low tech (technologies à base de récupération peu énergivores) (9) permettront de s’adapter et d’effectuer une transition la moins pénible possible.
L’agriculture sera en ligne de mire concernant le réchauffement climatique. La sécheresse, les fortes pluies, les inondations, le manque d’eau et bien d’autres facteurs perturberont fortement les récoltes. Comment pourrons-nous nous nourrir correctement si autant de catastrophes arrivent ?
Pour conclure
« Ne doutez jamais qu’un petit groupe d’individus conscients et engagés puissent changer le monde. C’est d’ailleurs toujours comme cela que ça s’est passé. » Magaret Mead.
Face à ces réflexions, je pense qu’il convient d’agir dès maintenant. Ne croyez surtout pas que nos petites actions sont inutiles. Au contraire, la somme des actions de millions de personnes est la vraie force. Si l’on attend des gouvernements ou des industries pour bouger, il sera trop tard… Pour cela, je vous incite à vous rendre sur le site www.cacommenceparmoi.org pour avoir des idées et vous bouger ! Je vous invite aussi à télécharger l’application 90 jours qui vous propose une série d’actions à entreprendre afin de lutter contre le réchauffement climatique.
Bon courage !
Sources:
- rLe Monde, 14/11/17: http://www.obs-vlfr.fr/web/images/11_14_2017_15000scientifiques.pdf
- Rapport du GIEC: https://report.ipcc.ch/sr15/pdf/sr15_spm_final.pdf
- https://www.wwf.fr/rapport-planete-vivante-2016
- « La 6ème extinction de masse », Elizabeth Kolbert, 2015.
- « La synergie alimentaire », Rémi Moha, éditions Lanore 2018.
- « La saucisse Suisse », Nouvo RTS 4/09/18.
- « La crevette grise »: https://mrmondialisation.org/lhorreur-de-la-mondialisation-dans-les-yeux-dune-crevette/
- « L’huile de palme durable, ça n’existe pas », www.futura-sciences.com 7/12/18
- Hors-série magazine Socialter « Et si tout s’effondrait ?», p.27, décembre 2018.
- Rappel de la citation lors de l’interview P. SERVIGNE & J. BLAMONT : INTRODUCTION AU SIÈCLE DES MENACES, Thinkerview.
- « Comment tout peut s’effondrer », Pablo Servigne, Raphaël Stevens et Yves Cochet. Editions Seuil 2015.
- http://lowtechlab.org/wiki/Accueil